dimanche 25 octobre 2009

Sunda Kelapa, Pasar Ikan

Vendredi 10 avril, j'émerge du sommeil en fixant une toile d'araignée accrochée à une dalle du plafond de la chambre et au carter du tube-néon ; elle flotte telle une voile mal bordée, bercée par les mouvements d'air du ventilateur sensé éloigner les moustiques et apporter un semblant de fraîcheur.
Après le bubur ayam (bouillie de riz au poulet) qui a bien calé mon appétit matinal, tandis que Tuti est occupée à la lessive et Tine à la préparation de perkedel jagung (fricandelles de maïs), je peux me consacrer à l'écriture de mon carnet de voyage.
Sari et son mari Oki arrivent. Ils apportent nos réservations de vol pour Bali que Tuti les avait chargés de trouver sur Internet à bon prix ; effectivement, le tarif est très intéressant (aller-retour pour 100 euros à deux). Ils ont contacté aussi un loueur de voitures de leur connaissance et nous ont réservés un véhicule pour 5 jours avec possibilité de prolonger, là aussi avec un tarif "indonésien" (une dizaine d'euros par jour)... le voyage à Bali s'organise pour le mieux !

Le repas terminé, nous partons dans le même quartier que la veille au soir, cette fois côté vieux port dont l'implantation remonte au XVI ème siècle, Sunda Kelapa, voisinant avec Pasar Ikan (marché aux poissons).
L'accès au port est payant (3000 rp) mais nous avons toute liberté de mouvement. Nous commençons la visite par le quai où sont amarrées de lourdes coques en bois à la proue pointue et élancée ; l'activité portuaire semble réduite à sa plus simple expression. C'est d'ailleurs assez étrange qu'il y ait si peu de monde, les navires semblent désertés par les équipages. Nous finissons par avoir l'explication : le gouvernement a accordé un long week-end de congés à cause des élections, si bien que dockers et marins sont rentrés au "kampung" pour la plupart. Quelques ouvriers s'affairent à l'entretien des planches des "carcasses bugis", installés en équilibre précaire sur d'étroites planches suspendues à des cordages et sans harnais de sécurité.
L'un d'eux nous propose de monter à bord ; l'accès au pont se fait par une longue poutre de 30 cm de large pour 20 d'épaisseur, le tout suffisamment incliné pour ne pas être complètement rassuré. Il y a bien un rainurage régulier pour faciliter l'accroche, mais aussi un cordage qui entrave le passage. Oki et moi, tentons l'aventure qui nous mène sur le pont, propre et dégagé, de ce bateau destiné au transport de sacs de ciment de Jakarta à Jambi sur l'île de Sumatra. La traversée a lieu 2 fois par mois et dure 5 jours dans chaque sens. Construit il y a une cinquantaine d'années à Kalimantan par des charpentiers Bugis, il est en bois de fer, matériau qui a la particularité de durcir au contact de l'eau. Le matelot estime qu'il vaut au moins un milliard de rupiah et que son armateur possède pratiquement toute la flotte du port. Le transport de passagers est possible à condition de ne pas l'ébruiter !
Il est temps de redescendre et dans ce sens, le déplacement paraît encore plus périlleux. Le marin propose ses services en nous tenant la main ; Oki n'est pas plus rassuré que moi et la  main secourable de notre guide a pour effet de nous donner confiance. Nous nous retrouvons sur le quai, un peu confus de notre manque d'assurance car en fait, le marin nous a simplement précéder sur la poutre en nous tenant la main et nous nous sommes senti pousser des ailes... surprenante sensation.
Après avoir remercié notre homme (en le gratifiant d'un pourboire bien mérité), nous poursuivons notre visite du port. Au bout du quai, des dockers s'activent à décharger un camion de sacs de ciment et remplir les cales d'un bateau semblable à celui que nous venons de visiter ; ces "costauds" circulent allègrement sur des poutres inclinées, se croisant à un rythme impressionnant, pieds nus ou chaussés de "sandal karet" (tongs) sans montrer de souci d'équilibre.
Plus loin, c'est un cargot chinois qui fait le plein de ciment avec une grue mécanique cette fois, mais en fond de cale, ce sont les dockers qui répartissent les sacs. Des tas d'autres matériaux pour la contruction, mais aussi une cargaison de motos attendent leur transfert, sans surveillance apparente.
Nous revenons à l'entrée du port, autrefois contrôlée par un phare-tour de guet (Menera Syahbandar) et défendue par des canons. Nous escaladons les marches de la tour jusqu'au toit pour avoir une vue panoramique de l'ensemble portuaire et d'une partie de la ville. Tout près du "Pasar Ikan" une retenue d'eau glauque est en partie recouverte d'emballages en plastique divers : on me demande de ne pas photographier ce genre de "paysage" peu flatteur pour le tourisme (malu) ! Je préfère témoigner de la réalité, même si elle n'est toujours belle à voir.

Allons voir "Pasar Ikan". En plein après-midi, aucun poisson à vendre (les produits de la mer sont vendus le matin, avant que le soleil ne darde ses rayons) mais des boutiques de marchandises pour la pêche, la navigation, etc, et plein d'autres étals d'un marché ordinaire. Disparus les marchands de tortues de mer naturalisées, de coquillages et de coraux aux couleurs flamboyantes : les mesures pour la protection des espèces menacées (interdiction à l'exportation par exemple) semblent avoir été efficaces...il était temps ! Et bizarrement, les "touristes" en mal d'acquisitions genre "exotisme animalier" ont disparu aussi.
Non loin de là se trouve le musée maritime (museum Bahari) mais c'est vers un autre ancien bâtiment hollandais que nous nous dirigeons : il est devenu la propriété d'un riche chinois qui en assure la restauration. Il abrite le restaurant "Galangan" mais aussi une collection très hétéroclite allant de céramiques et bibelots, majoritairement chinois, à une maison en bois sculpté typique de la région du centre Java, en passant par des troncs pétrifiés et une vieille Ford rouge. Le bâtiment lui même est remarquable par sa longue galerie parquetée et meublée  de bancs d'époque coloniale. Les pièces fermées de l'étage renferment des collections de meubles non ouvertes au public. Ce grand bâtiment avec sa cour intérieure engazonnée peut accueillir les invités de cérémonies de mariage ou autres. Evidemment, le droit de photographier librement tous ces trésors se paie en prenant une consommation sur la terrasse ; dans la moiteur étouffante de Jakarta, un jus de fruit frais sera des plus agréables.

1 commentaire:

  1. Si je vois bien, les penisis ne sont plus des 3 mâts comme dans les années 70. Je suppose qu'ils sont désormais propulsés par un moteur et qu'ils gardent un mât pour mettre une voile en cas de panne.
    D'ailleurs les mâts ont l'air bien modernes aussi. Importés de Chine? Du Japon, d'un autre tigre? ou bien de fabrication locale.
    Autre détail intéressant, les charpentiers Bugis qui s'installent à Kalimantan, alors qu'avant, ils étaient surtout dans la région d'Ujung Pandang (anciennement Makassar) sur les Célèbes.

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