samedi 10 octobre 2009

Jour d'élections à Jakarta

Les Indonésiens se sont rendus aux urnes, jeudi 9 avril, à travers leur archipel de 17 000 îles, pour renouveler le Parlement de Djakarta. Ce scrutin, auquel étaient conviés plus de 170 millions d'électeurs inscrits, a été entaché de violences juste avant l'ouverture des bureaux de vote, en Papouasie, province orientale où six personnes au moins ont péri dans des violences et où des bâtiments ont été incendiés. Le Parti démocrate du président indonésien, Susilo Bambang Yudhoyono, devrait remporter le plus grand nombre de sièges. Selon un récent sondage, il devrait obtenir aux alentours de 29 % des voix, contre 7,5 % en 2004.(extrait d'un article du "Monde" du 9 avril 2009)


Et oui, aujourd'hui jeudi 9 avril est un jour férié : ce sont les élections législatives en Indonésie. Les citoyens vont choisir leurs représentants aux différents parlements...le 8 juillet, ce seront les présidentielles
Contrairement aux évènements dramatiques de Papouasie relatés dans l'article ci-dessus, le calme règne dans la capitale.
A Setiabudi, vers 7 heures un haut-parleur a annoncé l'ouverture du bureau de vote pour 8 heures.
A 8 h15, je suis prêt pour accompagner Tine, Yani et Eddy jusqu'au terrain de badminton tout proche, sur lequel a été installé le bureau de vote en plein air.
Il n'y a pas foule et l'ambiance est bon enfant. La moitié de l'aire de jeu est abritée sous une toile où est installé le bureau de vote. Les panneaux d'affichage électoraux sont disposés contre une barraque en bois ; on y a punaisé les listes des candidats, plus ou moins nombreux selon le parti qu'ils représentent. Pour le DPD ("Dewan Perwakilan  Daerah", Conseil Représentatif des Régions) il y a 38 listes avec de 2 à 25 candidats dont les portraits s'étagent sous les logos de chaque parti.


Ces élections font "d'une pierre trois coups" puisque les électeurs se déplacent aussi pour élire le DPR ("Dewan Perwakilan Rakyat", Conseil Représentatif du Peuple) et le  DPRD ("Dewan Perwakilan Rakyat Daerah provinsi", Conseil Représentatif des Provinces).
Le Parlement Indonésien MPR (Majelis Permusyawaratan Rakyat, Assemblée Délibérative du Peuple) est bicaméral, réunissant le DPD et le DPR.
Si vous avez suivi, bravo ! Personnellement j'ai un peu de mal à comprendre, mais je crois que ce n'est pas plus simple chez nous. Toujours est-il que, pour ce que je peux en voir, cela se passe en toute décontraction, dans une grande transparence et une liberté qui n'avait pas cours sous le régime du Général-Président Suharto (de mars 1966 à mai 1998).
L'Etat  indonésien est toujours régit par les principes du Pancasila, énoncés par le futur Président Soekarno, le 1er juin 1945, mais la Constitution a subi, depuis quelques années, des amendements essentiels, conduisant à plus de démocratie. Les Indonésiens eux-mêmes appellent ce vent de liberté la "Democrazy" (le nombre de partis en présence semble leur donner raison) !

Mais revenons à Setiabudi. Le vote n'a toujours pas débuté à 8h20 ! Sans doute par souci de totale transparence, le président et ses assesseurs prennent le temps de déballer le matériel de vote aux yeux de l'assistance impassible (j'imagine le tollé qu'un tel scénario soulèverait en France) : on montre que les urnes sont vides et on les cadenasse, on sort les bulletins de vote de leur carton d'emballage et on prend soin de vérifier que le compte est bon. Les membres du bureau parafent les documents officiels et le responsable du secteur prend le temps de me saluer m'autorisant tacitement (et avec le sourire) à prendre des photos du déroulement des opérations. Les électeurs arrivent petit à petit, attendant sagement le début du scrutin. Il y a des sièges pour patienter et les panneaux d'affichage avec l'embarras du choix parmi tant de candidats.

Toutes les vérifications faites, le bureau de vote est enfin ouvert : il est 8h45 ! Le président annonce bien fort à l'assistance la procédure à suivre : même avec des moyens un peu "folkloriques", la démocratie est en marche.
L'un de mes beaux-frères est aux entrées ; il a en sa possession une liste de 232 inscrits. Les électeurs se présentent à lui avec une convocation, il vérifie la ligne qui correspond, leur attribue un numéro de passage. A l'appel de son numéro, chacun se présente à l'assesseur qui lui confie 3 bulletins de vote (format A1 minimum) qu'il doit signer, puis passe dans l'isoloir pas très adapté à la taille des bulletins géants. Cela se passe au "compte-gouttes", mais personne ne manifeste d'impatience malgré la durée du vote de chacun ; en effet, dans l'isoloir en zinc, trop étroit, il faut cocher, sur les 3 bulletins dépliés, la liste de son choix, puis les replier de la manière la plus plate possible pour venir les glisser dans l'urne appropriée, reconnaissable à sa couleur (rouge, bleu ou jaune). Enfin, un assesseur présente une bouteille d'encre indélébile dans laquelle, une fois accompli son devoir citoyen, l'électeur trempe le bout de son auriculaire gauche.
Juste avant midi, tous les membres du bureau votent à leur tour avant la clôture du scrutin puis s'octroient deux heures de pause avant de dépouiller les bulletins des 174 votants sur les 232 inscrits (seulement et heureusement, vu la lenteur du déroulement des opérations) du "bureau de quartier 018, Karet Setia Budi, Jakarta-selatan".
Tout s'est déroulé dans la bonne humeur, le calme, sans aucune manifestation ni contestation malgré le retard et certains petits disfonctionnements. L'épicier du coin est heureux, il a fait des affaires : les électeurs, souvent accompagnés de leurs enfants ont dévalisé son stock de boissons (coca-cola, teh botol) et de nourriture en tout genre (biscuits, kerupuk...) à consommer en attendant que cela se passe. J'ai reçu un accueil chaleureux des habitants du quartier et ai pu prendre toutes les photos que je souhaitais, certaines même à leur demande !

Je n'ai pas ressenti cette solennité, cette espèce de "stress", qui accompagnent les élections en France et je remercie tous ces Jakartanais qui m'ont laissé agir à ma guise, en toute liberté.

   

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