lundi 21 décembre 2009

Goa Gajah, Gianyar, Jimbaran

Tuti s'inquiète de savoir comment retrouver notre neveu Oki. Aller le chercher à l'aéroport va obligatoirement nous faire "gaspiller" une demi-journée de visite. La liaison entre Ubud et Jakarta par portable fonctionne parfaitement : Oki va se débrouiller pour nous éviter un déplacement pénible jusqu'à "Ngurah Rai International Airport" en utilisant les transports locaux pour se rapprocher de nous. Ils nous appellera une fois arrivé à Bali.

L'idéal serait de lui trouver une chambre à Wena Homestay ; la chance est avec nous puisque "la râleuse" s'en va et libère sa chambre dans l'autre bungalow. Tuti négocie la location pour 70000 Rp avec l'accord d'Oki.
Tous ces petits problèmes résolus pour le mieux, nous voilà partis pour Goa Gajah après avoir fait remplir de "premium" le réservoir de notre Karimun. Le site se situe à 2 km d'Ubud. Il est encore tôt, 9 heures du matin, le parking est pratiquement vide et les boutiques de souvenirs pas encore ouvertes. Munis du ticket d'entrée (6000 Rp) et du sarong de circonstance, nous gagnons le site en contrebas du parking.
"Goa Gajah" signifie "grotte de l'éléphant" : en dehors des éléphants importés de Sumatra dans le cadre d' Elephant Safari Park (voir article "Marché et volcan"), aucun pachiderme n'a jamais vécu à Bali. L'explication du nom de la caverne pourrait se trouver dans le fait qu'elle se situe dans la vallée de la rivière Petanu jadis appelée "fleuve de l'éléphant" ; pourquoi ne pas penser aussi à son contenu ?... on va le voir!

En arrivant sur l'esplanade, à gauche du chemin d'accès, des tas de pierres empilées sont présentées comme les ruines de l'ancien temple détruit par une éruption du Gunung Agung. A droite un "balé" récent, de bonne taille, mais c'est d'abord vers un bassin en pierre à double réservoir, alimenté chacun par trois nymphes déversant l'eau de leur "guci" (jarre) que nous nous dirigeons. Ces fontaines n'ont été retrouvées qu'en 1954 par un groupe d'archéologues néerlandais, mais le mystère demeure quant à l'origine de leur construction. L'endroit est agéable et rafraîchissant, les poissons rouges ont l'air de s'y plaire !


Sur la gauche, l'entrée de la grotte ("goa") est facilement repérable grâce à une façade où le maître sculpteur a donné libre cours à son imagination débordante. Un démon dont on ne voit que la tête semble écarter de ses gros doigts pressés sur sa joue droite des motifs végétaux où se mêlent quelques animaux étranges et têtes humaines grimaçantes. Les sourcils arqués et marqués, les yeux exorbités, le nez rond et épaté, le monstre ouvre son immense gueule sur le conduit ténébreux de la caverne. Le style débridé de la sculpture prend beaucoup de liberté en regard des thèmes habituels de l'art hindo-javanais. Bien que n'étant pas spécialiste, il me semble  que s'exprime dans cette façade délirante tout l'imaginaire - que l'on retrouve par ailleurs dans l'expression picturale et musicale - qui caractérisent l'art balinais ...
Mais pénétrons maintenant dans l'obscurité de cette grotte qui pourrait, elle aussi, avoir été creusée par l'ongle de notre fameux géant "Kebo Iwa" (oncle buffle),  auquel il est fait allusion dans l'article précédent.
Goa Gajah (album), redécouverte en 1923, toujours par des archéologues néerlandais, daterait du XIème siècle ; il s'agirait vraisemblablement d'un lieu destiné, à l'origine, à la méditation des moines bouddhistes.

Le plan de la caverne forme un "T" : un couloir transversal est perpendiculaire au tunnel d'entrée. Dans le fond gauche, une niche abrite une statue de Ganesha, dieu de la sagesse à tête d'éléphant (explication la plus simple pour le nom du lieu), à l'opposé, dans une autre niche, 3 effigies de la trimurti (les dieux Brahmâ, Vichnou et Shiva n'étant pas représentables) dans une 1ère hypothèse ou des vestiges de lingam, symbole phallique de Shiva, dans une 2ème hypothèse (dans ce cas la yoni n'est pas loin, mais où ?). Le socle des sculptures est entouré d'une pièce de tissu tricolore : blanc, rouge, noir. De même, un foulard de chacune de ces couleurs ceint  les supposés lingam. Sur la paroi face à la sortie sont creusées des niches réservées, sans doute, à la méditation des sages. Des offrandes simples sont déposées au pied les statues.
Nous ressortons au grand jour et jetons un oeil sur les très anciennes sculptures datant de la création du temple, à proximité de la grotte. Il y a une entre autre d'Hariti, ogresse dévoreuse d'enfants, convertie par la parole convaincante de Bouddha en déesse protectrice de ses ex-victimes, devenue symbole de fertilité ... comme quoi, il ne faut jamais désespérer de l'enseignement !!!
Je vous laisse méditer sur ces belles paroles,  tout en vous baladant un court instant dans la vallée toute proche de la rivière Petanu, longtemps maudite dans les légendes balinaises, mais heureusement réhabilitée pour irriguer de la plus belle manière les rizières environnantes...ouf ! En route pour la promenade (album).

Une petite anecdote : une ouvrière, transportant sur son crâne trois parpaings de ciment (et oui, c'est comme ça à Bali, les femmes se chargent des tâches les plus harassantes !) s'arrête près de moi pour me signifier qu'elle adore les poils de mes épaules et me montre fièrement ceux qu'elle a sur les mollets (phénomène plutôt rare chez les femmes indonésiennes).  Joignant le geste à la parole, je lui montre que mon système pileux n'est pas en reste côté gambettes et me compare à un "monyet" (singe) : elle repart en éclatant de rire, la charge sur sa tête ne vascillant pas d'un pouce ! C'est quand même "sympa" de pouvoir s'exprimer dans la langue du pays, ça change tout !...

Notre visite terminée, nous voilà partis pour Gianyar (album), capitale administrative et commerciale du district du même nom. La spécialité de la ville, qui n'a guère la vocation touristique, serait plutôt le textile. Autrefois, on trouvait facilement des ateliers de tissage que l'on pouvait visiter, au bord de la route principale, à l'entrée ouest de la ville. Aujourd'hui, ce sont surtout des "show-rooms" de luxe qui attendent le touriste, apparemment sans trop de succès. Les tissus sont des "ikat", "endek" à Bali, et certains sont du plus bel effet : ces cotonnades sont souvent vendues au mètre et leur prix varie selon la qualité du fil, la complexité et la finesse du tissage.
Là encore, la ville paraît plus propre, mieux aménagée. Nous nous garons devant l'entrée du "pasar umum"  (marché public). Les marchandes de fleurs, fruits, légumes sont installées à même le sol. Il y a deux bâtiments à un étage dans lesquels on aperçoit des tas de marchandises variées...mais nous n'avons pas le courage de pénétrer à l'intérieur. Un peu plus loin, un espace est réservé aux "gerobak" (carrioles) bleues des marchands ambulants ; une fumée bleue elle aussi s'échappe de quelques grils à "saté" (brochettes) embaumant l'air d'une odeur appétissante. Un peu plus loin, Tuti essaie sans conviction de marchander un tissu "endek".
Nous rejoignons la voiture garée juste devant un restaurant dont la spécialité semble être le "babi guling" ; c'est appétissant, ça me tente, mais les conditions d'hygiène dans lesquelles la marchandise est présentée (emballée dans du papier journal !) nous font renoncer à cette gourmandise...dommage !

De retour à Ubud, Oki nous fait savoir qu'il a atterrit et qu'il prend le bus pour Gianyar. Nous voilà donc repartis d'où nous venions ; nous avons un peu de temps et nous retournons au "pasar umum" où j'ai repéré des poupées de cérémonies, bien colorées, que je trouve très décoratives. Dans un premier magasin, la marchande ne baisse pas son prix (175000 Rp) ; dans le deuxième "toko", le prix tombe à 135000 Rp "sepasang" (10 euros le couple)...ça fera un cadeau original !
Pendant ce temps Oki nous annonce son arrivée au "terminal bis" (gare routière) non pas de la ville de Gianyar, mais de  Batubulan, commune du district de Gianyar mais se situant juste à la sortie Est de Denpasar, à une trentaine de kilomètres de là ! Il devra patienter avant que nous arrivions.
Nous voilà à la gare routière où Oki nous attend ; je lui propose de prendre le volant, ce qu'il fait volontiers. Nous prenons la direction du "temple mère" de Besakih ; mauvaise inspiration ! Tout au long de la route qui grimpe sur les pentes du Gunung Agung, nous croisons plein d'autobus chargés de Balinais dans leur tenue blanche de cérémonie. Kuningan n'est pas terminé, mais peut-être qu'en milieu d'après-midi, il y aura moins de pélerins ... erreur ! à 7, 8 kilomètres de l'arrivée un ralentissement se forme. Un peu plus loin, c'est carrément un bouchon rendu encore plus inextricable par l'indiscipline des chauffeurs qui doublent tant et plus la file de voitures arrêtées, sans visibilité.
Plus aucun véhicule ne descend : notre visite semble bigrement compromise ! Las, nous décidons alors de faire demi-tour ; Oki nous invite à manger à Jimbaran, au Sud de l'aéroport, en espérant arriver avant le coucher de soleil.

Plus nous nous approchons, plus la circulation se densifie ; elle devient même infernale dans ce secteur touristique où l'on peut voir les "bulé" à moto, 
encombrés de leur planche à voile, se comporter sur la route comme jamais ils n'oseraient le faire dans leur propre pays. Nous finissons par arriver sur la plage de Jimbaran (album) juste au crépuscule.

Nous nous garons pour faire quelques pas sur la plage ; comme je m'approche de l'eau, deux jeunes filles m'interpellent ; je finis par comprendre dans leur Anglais fortement "chinoisé" que l'une d'elles souhaite se faire prendre en photo avec moi. J'accepte de bon gré et, au moment où la photographe appuie sur le déclic, une vague vient me recouvrir les pieds. Tout le monde rigole et nous en sommes quittes pour reprendre la pose.

Oki tient à nous conduire dans un restaurant "sea-food" qu'il a expérimenté avec ses copains. Nous "tournons" un peu pour le retrouver car il n'en manque pas. Nous entrons dans un parking bien rempli ; il s'agit en fait d'un complexe de restauration spécialisée dans les poissons et fruits de mer. Plusieurs enseignes mais tous fonctionnent sur le même principe. Nous choisissons nos "proies" vivantes pour les faire griller : calamar dont la taille imposante autorise 2 cuissons différentes (grillé et frit), une quinzaine de gambas et un joli poisson.
Nous allons prendre place à une table sur la plage, tout près de l'océan. Des bougies éclairent les tables tandis qu'une armée de lumignons peuple le sable dans la nuit. 
Dans le restaurant voisin, seulement séparé du nôtre par une légère barrière végétale, une promotion de jeunes Indo-sino-australiens, plutôt bcbg, semble fêter ce que l'on suppose être l'obtention de leur diplôme. Chacun y va de son petit discours, remerciements au professeurs, applaudis comme il se doit une fois prononcé.
Notre repas arrive enfin : tout est très appétissant ! Le riz est présenté dans un panier en bambou tressé avec quatre petits bols de "sambal" : halus (purée de piment), kasar (piments grossièrement écrasés), kecap manis (sauce de soja sucrée), et bawang putih halus (aïl ecrasé).

Tandis que nous attaquons ce repas pour le moins délicieux, un groupe de six musiciens donne la sérénade pour les étudiants voisins ; ils chantent et jouent des standards de la musique internationale et à la demande. Bon sang, ce repas est un régal : je m'en lèche "les cinq doigts et le pouce". Quand Tuti "m'oblige" à terminer les brochettes de calamars et les gambas, j'ai peu de difficulté à relever le défi ... vraiment savoureux avec ces sambal "cukup pedas"
(assez relevés). Je finis mon verre de thé pour faire glisser et il ne reste plus qu'à rentrer à Ubud : heureusement, Oki est un bon chauffeur, merci ! 

On imagine aisément que l'endormissement après une telle journée - et surtout un tel festin - ne devrait être qu'une formalité. Nos voisins de chambre, un "bulé" d'un âge certain, genre "qui a roulé sa bosse dans les bars enfumés" et sa jeune "accompagnatrice"  asiatique ("kupu-kupu malam" ? / papillon de nuit ?) ne nous laissent aucun doute sur leur activité nocturne ! L'épaisseur de la cloison se montre insuffisamment isolante, phoniquement parlant, pour nous épargner la nature de leurs ébats. Les (ré)jouissances semblant vouloir se prolonger, Tuti finit par protester : l'effet "seau d'eau" escompté ne se fait pas attendre et calme la nuit, permettant au sommeil réparateur de pouvoir enfin nous gagner. Désolé m'sieur dame !

"Selamat tidur" (dormez bien) !   

1 commentaire:

  1. cet article me donne envie de manger des fruits de mer a Jimbaran!! j'aime bien l’atmosphère quand on mange la bas..

    RépondreSupprimer